LA COMMUNE DE PARIS 1871 : LA SOCIALE ! ET NON PAS LA PATRIOTE !

Publié le par SCALP87

 

LA COMMUNE DE PARIS 1871 :
LA SOCIALE ! ET NON PAS LA PATRIOTE !


En ces temps de flou politique et de magouilles politiciennes, de crise économique, de licenciements massifs, chômage, et en contrepartie, de grands renforcement à coups de milliards dans les banques et entreprises (qui, suivant la mode américaine, sont bien sûr fictifs), l’extrême droite est à l’affût du moindre coup pour attirer les masses populaires à sa cause.

C’est ainsi que nous assistons à un grand élan vers le révisionnisme de la part de ces nouvelles organisations « gauchisantes » de l’extrême-droite (voir l’article « les nouveaux fascistes : tournant stratégique et inquiétant »), notamment le révisionnisme de l’histoire ouvrière et des mouvements sociaux que l’extrême-droite, frustrée de ce passé ne lui appartenant pas, veut aujourd’hui s’accaparer.


Nous remarquons en ce moment beaucoup de discours sur le passé social et les luttes du prolétariat (français et européen) où l’extrême-droite joue sa comédie habituelle de nostalgie, mais aussi pour cause de « mode révolutionnaire ».

Cette comédie a pour but de brouiller l’opinion, pouvant donc être prise au sérieux, notamment quand par exemple les Jeunesses Identitaires se revendiquent « enfants de la Commune » (ainsi que tous les groupuscules nationaux-révolutionnaires et se réclamant du "socialisme national") plaçant en avant l’aspect patriotique du soulèvement populaire parisien (Paris est assiégé par l’armée Prusse et l’Etat français est incapable de les battre, cela laisse ainsi le peuple parisien seul face à l’attaquant) et non son aspect socialiste.

Peut-être l’extrême-droite a-t-elle elle-même oubliée d’où elle venait (ses origines politiques)… pour ainsi défendre la mémoire de son opposé.


Cette prise de position de l’extrême-droite sur ce point est bien évidement intolérable pour nous qui sommes issus de cette histoire, nous qui maintenons sa continuité idéologique et sa mémoire. Une analyse s’impose donc pour remettre la réalité en lumière.


En effet un aspect patriotique peut être souligné dans le soulèvement populaire de la Commune, car les mentalités de l’époque sont tout autre que celles de maintenant, la France oscille entre coups d’Etat monarchiques et impériaux, députés et gouvernements républicains corrompus, misère sociale, crises politiques et d’identité… et bien sur les guerres, celle avec la Prusse, durant laquelle la trahison des classes dirigeantes franco-prussiennes vont les mettre à l’épreuve.

Ce qui naît dans cette période révolutionnaire qu’est la Commune est le germe de la démocratie directe et le premier pas d’un pouvoir populaire autogéré, celui du peuple parisien ouvrier et artisan conscient de sa force, responsable de délégation et de révocabilité.


UNE REVOLUTION OUVRIERE ET DE LA FEMME.


Ainsi comme le proclame le journal officiel du 21 mars 1871 :

" Les prolétaires de la capitale, au milieu des défaillances et des trahisons des classes gouvernantes, ont compris que l’heure était arrivée pour eux de sauver la situation en prenant en main la direction des affaires publiques. "


Ouvrière, parce que 84% des communards arrêtés sont des travailleurs manuels.

Révolutionnaire, parce que la diversité de pensée qu’on retrouve dans les rangs communards émane de tous les courants révolutionnaires de l’époque (néo-jacobins, proudhoniens, néo-proudhoniens, blanquistes, bakouninistes, marxistes, francs-maçons…). Cette diversité laissera remarquer d’ailleurs une certaine rivalité paralysante dans la Commune.

Ces courants restent les premiers et plus puissants réflexes républicains face à une restauration monarchique quelconque. La classe ouvrière de l’époque est très hétéroclite, entre un prolétariat d’usine jeune et un artisanat sans-culotte adolescent, ce qui bien sûr a comme conséquence l’inexpérience des communards face à la situation extrême, mais par contre on se rappelle des insurrections passées comme en 1848 ou encore la révolte des canuts à Lyon en novembre 1831.

C’est pourquoi les communards, plus préparés, de part l’Internationale, vont faire naître une nouvelle gestion directe de la vie grâce aux thèses communistes et anarchistes récentes et aux pratiques de mutualisation déjà perpétrées dans le monde ouvrier en lutte pour contrer la trahison de la bourgeoisie et du gouvernement fuyant.


Ces évènements laissent également remarquer le rôle vital et incontournable des femmes dans leur investissement à la Commune, ainsi Jules Vallès dans « Le Vengeur » du 12 avril 1871 écrit : " J’ai vu trois révolutions, et, pour la première fois j’ai vu les femmes s’en mêler avec résolution, les femmes et les enfants. Il semble que cette révolution est précisément la leur et qu’en la défendant, ils défendent leur propre avenir. "

Est d’ailleurs créé pour la première fois un mouvement féminin : l’Union des femmes.

Des projets d’instruction pour les filles visent à les affranchir de l’emprise oppressante de la religion et du patriarcat, elles obtiennent un travail égal, un salaire égal et créent de nombreux ateliers autogérés. La Commune officialise l’union libre pour les mariages et bannit également la prostitution considérée comme " l’exploitation commerciale de créatures humaines par d’autres créatures humaines. "

Louise Michel sera bien évidement la figure emblématique du combat féminin dans la Commune.


UNE DEMOCRATIE DIRECTE ET CITOYENNE.


Le Comité Central de la Garde Nationale (émanation du peuple en armes) fait fonctionner les services publics laissés à l'abandon par la bourgeoisie et les tenants du pouvoir qui ont fui devant les prussiens. Ce Comité proclame avant les élections à la Commune du 26 mars 1871 :

"Les membres de l'assemblée municipale, sans cesse contrôlés, surveillés, discutés par l'opinion, sont révocables, comptables et responsables."

"Quand nous pourrons avoir les yeux partout où se trouvent nos affaires, partout où se préparent nos destinées, alors, mais seulement alors, on ne pourra plus étrangler la république."

Le club Nicolas-des-Champs écrira également : " Peuple, gouverne-toi toi-même par tes réunions publiques, par ta presse ; pèse sur ceux qui te représentent ; ils n’iront jamais trop loin dans la voie révolutionnaire. "


Ainsi, les élus qui seront nommés pour occuper la représentation du peuple au sein de la Commune peuvent être révocables par le conseil du peuple et de l’assemblée.

Nous avons à faire à une authentique démocratie, son sens étymologique et véritable (démos = peuple ; kratein = pouvoir), le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Certes une démocratie directe à l’échelle d’une ville et durant une soixantaine de jours dira t-on… mais quelle remise en question de la bureaucratie et de la bourgeoisie à l’époque et quelle preuve de la force du peuple travailleur à s’émanciper lui-même !

Cette souveraineté populaire, pleinement assumée, s’inscrit fort bien dans la filiation de la Constitution de 1793, qui proclamait " le droit à l’insurrection " comme " le plus sacré des droits et le plus imprescriptible des devoirs ". A noter également la forte participation d’étrangers dans la Commune : Belges, Luxembourgeois, des réfugiés juifs hongrois, garibaldiens italiens… La devise Marxiste du manifeste du parti communiste (1848) : " Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! " est incarnée par la Commune.


LE MASSACRE ET LA REPRESSION.


La réponse des tenants du pouvoir français ne se fait pas attendre devant cette œuvre novatrice et spontanée : 25 000 à 30 000 massacrés (dont femmes et enfants), 36 000 prisonniers, 4586 déportés en Nouvelle-Calédonie.

Après de longs combats urbains, commençants le 21 mai avec l’entrée des troupes versaillaises (commandées par les classes dirigeantes) dans Paris, le dernier bastion communard tombe le 27 mai et l’exécution des derniers s’opère le lendemain au Mur des Fédérés. Hommes, vieillards, femmes, enfants sont fusillés, les prisonniers sont déportés.


Ces versaillais arborant le drapeau tricolore contre le drapeau rouge du sang du peuple, sont ces mêmes personnes adeptes aujourd’hui de l’extrême-droite, de ces organisations racistes, révisionnistes et réactionnaires qui essayent de s’approprier l’héritage de la Commune pour se donner bonne conscience en se convaincant qu’ils ne sont pas des assassins du peuple, pour se persuader qu’ils ont quelque chose de populaire, de social, une solution pour le peuple et un héritage… IL N’EN EST RIEN !

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